Tanger, cité blanche qui, perchée sur une butte, surveille tous azimuts l’Europe et l’Afrique, l’Atlantique et la Méditerranée. Ville de tous les échanges, polyculturelle, premier port d’Afrique, porte d’entrée d’un monde d’exotisme pour des générations de peintres et d’écrivains en mal d’inspiration.
Nous avions découvert Tanger mystérieuse et mélancolique dans le film Only lovers left alive, puis l’avions admirée, magique et envoûtante, sur des photographies. Enfin, après plusieurs années à rêver d’elle, nous voilà à sa porte.
Nous choisissons de loger au cœur de la médina afin de mieux nous perdre dans l’ambiance intemporelle de ses ruelles. Nous perdre… c’est le cas de le dire. Chaque fois que nous sortons, nous nous emmêlons les pinceaux.
Organiser notre propre « perte » à Tanger est à double tranchant. Nous passons de la ruelle la plus cracra à la plus croquignolette. Certaines sont réellement adorables, murs couverts de bleu, pavés parsemés de chats alanguis.
La médina de Tanger, à l’inverse de celles de Marrakech, Fès, ou Essaouira, ne s’est jamais retrouvée envahie de touristes, ce qui minimise le nombre de boutiques de tapis, babouches et autres bricoles « juste pour le plaisir des yeux ».
À la place, des habitants qui dévalent ou remontent les ruelles, des épiceries, des coiffeurs, un marché plein d’olives, de pains aplatis et de mandarines. Pardon, de tangerines, la variété qui tient son nom de la ville.
La partie la plus photogénique de la médina, avec ses murs régulièrement repeints et ses pavés impeccables, est la kasbah fortifiée, le point le plus haut de la colline.
À la question du nombre incroyable de chats dans les rues du Maroc, nous avons trouvé deux réponses. L’une est terre à terre, ils chassent rats et souris. L’autre est spirituelle, le prophète Mahomet possédait un félin et l’aimait beaucoup. Les deux raisons doivent se mêler, saupoudrées d’un peu d’Oh comme ils sont mignons !
Il est un animal que les Marocains adulent plus encore : la Vache qui rit ! Nous sommes sérieux, les petits triangles de fromage sont incroyablement populaires ici. Publicités à la télé, dans la rue, sur les devantures d’épiceries, au petit déjeuner, étalés sur une crêpe msemen, en sandwich, en rayon entier au supermarché… partout !
Mais revenons-en à nos moutons. Sur la gauche de la Kasbah, un balcon offre une vue sur la Méditerranée qui laisse contemplatif.
Si au contraire nous redescendons de la Kasbah par la droite, nous nous retrouvons dans la belle rue d’Italie, une artère un peu plus large qui contraste avec le reste de la médina. En hiver, les orangers qui la bordent croulent sous le poids de leurs fruits.
Tout en bas de la rue d’Italie, nous voilà sur la place du Grand Socco, dérivée du mot souk en espagnol. Le souk en question n’est plus au cœur de la place, il s’est réfugié dans une allée couverte.
Quelques ingrédients achetés ici nous permettent de cuisiner notre tout premier tajine maison, une réussite !
La place du Grand Socco s’entoure également d’une belle mosquée et de la Cinémathèque de Tanger, qui passe des films méticuleusement choisis tout en servant des cafés en terrasse.
Puisqu’il y a un Grand Socco, il y a forcément un Petit Socco. Lui non plus n’héberge plus de souk, mais à la place, quatre ou cinq cafés qui empiètent sur la rue.
Pour le petit déjeuner, un slogan sur le mur de l’un d’eux nous convainc : « Toujours le service est rapide et frais ». Nous confirmons. À peine la commande passée, le serveur court à la boulangerie du coin et nous rapporte des crêpes baghrir (mille trous) encore chaudes qu’il arrose de miel et d’amlou. Redoutable.
Petit conseil pour les voyageurs au Maroc : prenez le temps de demander aux gens s’ils vont bien. Que ce soit aux commerçants, aux taxis, aux passants qui vous indiquent votre chemin, au policier qui vous contrôle… à tout le monde ! Il nous aura fallu plusieurs visites dans le pays pour comprendre cela. Et ne passez pas à un autre sujet en un éclair, non, réjouissez-vous de la réponse. Vous gagnez immédiatement dix points de sympathie !
Sur une autre pente de la colline, nous entrons dans un quartier au look nettement plus européen. Les vieux immeubles roses-orangés de trois ou quatre étages rappellent même clairement l’Espagne. Ce n’est pas la façade décrépie du Gran Teatro Cervantes qui nous contredira, ni les restaurants qui servent de la paella.
Nos pas nous mènent enfin jusqu’à la grande promenade du front de mer. Le quartier est moderne et clinquant, il n’a absolument plus rien à voir avec la tortueuse médina, ni même avec le quartier « espagnol ». Une longue rangée de clubs et de bars lounge attendent les beaux jours et surtout les belles nuits d’été pour redémarrer leurs sonos.
Les baigneurs aussi attendent les beaux jours. En plein mois de février, nous avons bien plus envie de nous abriter du vent que d’enfiler un maillot. Nous ne croisons que des dromadaires, et leurs maîtres bien sûrs, qui foncent droit sur nous pour nous proposer une balade sur bosse. Non merci, nous avons mieux en tête !
Le Parc Perdicaris avec vue sur l’océan
À l’ouest de Tanger, la côte méditerranéo-atlantique (c’est ici que la mer et l’océan se rencontrent) est réputée belle et sauvage. Nous hésitons à nous rendre aux grottes d’Hercule mais, sans voiture, nous nous rabattons sur le Parc Perdicaris accessible en bus. Bien nous en prend. Nous débarquons dans une vaste forêt de pins qui surplombe la mer azur.
Nous pensions nous retrouver seuls, houlà non ! Par ce beau dimanche de février, tout Tanger a eu la même idée que nous. Des marcheurs et des fans de VTT se frayent un chemin entre des familles et des groupes d’amis qui déploient des pique-niques gargantuesques. Nos pauvres sandwichs font pâle figure à côté.
Nous nous écartons des tam-tams et des you-yous (le cri de fête des Marocaines) afin d’explorer les différents points de vue, humer les embruns, plisser les yeux pour tenter d’apercevoir les côtes espagnoles et profiter des belles nuances de vert du nord du Maroc !
Notre avis sur Tanger
Voilà une ville qui possède une véritable identité, quelque chose d’un peu intense mais indéfinissable, loin des clichés du Maroc désertique et touristique. Nous avons arpenté Tanger pendant deux jours et demi, mais il doit être bien agréable d’y passer encore plus de temps pour flâner dans ses ruelles, s’asseoir dans ses cafés, voir un film à la cinémathèque, compter les mouettes…!
Conseils pratiques pour visiter Tanger
Transports entre Asilah et Tanger
Nous sommes arrivés depuis Asilah en une heure de train. Le prix est de 16 dirhams par personne et il n’est pas nécessaire de réserver. Consultez juste les horaires au préalable car les départs sont rares.
Transports entre Tanger et Rabat
Une ligne de TGV toute nouvelle toute belle vient d’être inaugurée entre Tanger et Casablanca, le premier train à grande vitesse d’Afrique. Nous l’avons emprunté pour nous rendre à Rabat après Tanger. Prix 172 dirhams (et moins cher si vous voyagez en semaine), durée 1h20.
Rejoindre la médina de Tanger depuis la gare
Montez dans un petit taxi (couleur turquoise) et comptez 15 dirhams. Ils sont normalement équipés de compteur. Si ce n’est pas le cas, demandez le tarif avant de monter et refusez si c’est supérieur à 20 dirhams.
Se loger à Tanger
Nous tenions à loger au cœur de la médina et nous y avons trouvé cet appartement (~34€ la nuit)i. Il est un peu sombre car dans une ruelle étroite, mais très propre et doté d’une cuisine bien équipée (avec un plat à tajine !). Bref, un bon plan. Les gérants sont arrangeants, notamment pour garder les bagages.
Avec du recul, il ne nous semble pas indispensable de loger exactement dans la médina. De nombreux hôtels se situent dans les environs immédiats et vous pourrez alors tout visiter à pied.
Si en revanche vous tenez à dormir dans le coin le plus mignon de Tanger, cherchez du côté du Musée de la Kasbah. Vous mettrez toutes les chances de votre côté en utilisant le filtre « avec vue » sur un comparateur d’hôtels, puisque les plus belles ruelles sont au sommet de la colline. Voir ce lien Bookingi.
Où Tanger à manger ? Euh… l’inverse
Le seul restaurant que nous ayons testé était un petit syrien appelé Abou Tayssir. Il tient plus du fast-food que du restaurant, mais on y mange bien et il est géré par une femme vraiment très sympa ! Déjeunez sur place ou emportez la nourriture pour la déguster sur la place du Grand Socco.
Se rendre au Parc Perdicaris
Cela se fait facilement avec le bus de ville n°5. Il se prend à la station Sidi Bouabid, non loin du Grand Socco (ici). La station n’indique pas le n°5, mais il passe bien ici toutes les 20-25 minutes. Descendez à la station « Forêt Rmilat » (ici). Prix du trajet : 3,50 dirhams.